L’usure et la pénibilité, nos secteurs particulièrement exposés
Dans un contexte d’allongement de la vie professionnelle et avec un taux d’emploi des seniors en France plus faible qu’en Europe, les questions de soutenabilité du travail et de prévention de l’usure professionnelle deviennent particulièrement prégnantes.
La santé physique et psychique ainsi que la satisfaction au travail sont déterminantes dans la capacité et la motivation à rester en emploi des travailleurs expérimentés. Ainsi, la fréquence des accidents du travail diminue avec l’âge mais la durée moyenne des arrêts de travail pour maladie et accidents du travail est plus longue.
L’OCDE rappelle également que les pays où les seniors travaillent le plus longtemps sont aussi des pays où de nombreuses nouvelles technologies sont mobilisées pour limiter la pénibilité et l’usure. Enfin, plus le travail est perçu comme insoutenable (physiquement ou psychologiquement), moins les travailleurs et les travailleuses envisagent de pouvoir travailler plus longtemps. Les Troubles musculosquelettiques (TMS) représentent la première cause de maladies professionnelles indemnisées (88 % des maladies professionnelles reconnues par le régime général : 44 492 cas en 2019). Pourtant, les facteurs ergonomiques (manutention, posture pénible, etc.) qui constituent la cause principale des TMS ont été écartés du Compte professionnel de prévention (C2P). De même, les conditions cumulatives de déclenchement de l’obligation de négocier un accord de prévention de l’exposition aux risques professionnels (effectif de salariés concernés et taux de sinistralité de l’entreprise) limitent, de fait, la mise en œuvre du dialogue social permettant de déterminer les actions pertinentes pour prévenir la pénibilité et l’usure professionnelle.
PROPOSITIONS ET REVENDICATIONS CFDT-SERVICES
La CFDT revendique :
• la mise en place effective d’une cartographie au niveau des branches visant à identifier les métiers à fort risque d’usure afin de : - anticiper des dispositifs de reconversion avec une priorité d’accès pour les travailleurs exposés à des facteurs d’usure (y compris aux 3 facteurs ergonomiques exclus du C2P), - mettre en place ou développer des actions de prévention dès la formation initiale, - prévoir des dispositifs d’aménagement du temps de travail avec une priorité d’accès (temps partiel, retraite progressive, etc.), - favoriser l’attractivité sur ces métiers avec des perspectives de carrière ;
• l’instauration d’une négociation obligatoire dans les entreprises, administrations et branches professionnelles visant la soutenabilité du travail et la prévention de l’usure (impact de ’intensification du travail, charge de travail, organisation et aménagement du temps de travail, reconversion et fin de carrière, etc.) ;
• une évaluation obligatoire annuelle de la charge de travail pour tous les salariés ;
• l’élargissement des conditions de déclenchement de l’obligation de négocier un accord de prévention de l’exposition aux risques professionnels ;
• le renforcement des moyens des CPRI (TPE) afin de contribuer à la prévention de l’usure dans les TPE ;
• la mobilisation du Fonds d’investissement pour la prévention de l’usure professionnelle (FIPU) pour contribuer à la prise en charge de la prévention des TMS en entreprise.
Pour la CFDT, les mesures mises en œuvre en faveur de la prévention de l’usure professionnelle dans les entreprises ou les administrations restent majoritairement des mesures réparatrices ou correctrices plutôt que de réelles mesures préventives.
Il est donc nécessaire de privilégier au maximum les mesures de prévention dès le début de la carrière, en agissant sur les causes d’usure et en mobilisant l’ensemble des leviers de la prévention (organisation du travail, développement des compétences des managers et des salarié.es, parcours, reconversion, dialogue social, dialogue professionnel, etc.). Les actions de prévention doivent porter sur l’usure psychique autant que sur l’usure physique. Une attention particulière doit être accordée à la prévention de l’usure pour les femmes, dans la mesure où elles sont davantage confrontées à de l’usure psychique (manque de soutien, stress, travail dans l’urgence) et à de l’usure physique moins visible (gestes répétitifs, petites manutentions, etc.). Des dispositifs de prévention spécifiques aux salariés des TPE doivent également être envisagés.