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JOP DE PARIS 2024 : QUEL DIALOGUE SOCIAL ?

Publié le 30/04/2024

Les Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024 vont mobiliser cet été en Île-de-France de considérables moyens humains et matériels. De nombreux agents de la fonction publique, salariés et bénévoles seront appelés à assurer le bon fonctionnement des transports, des infrastructures, à garantir l’hébergement et l’accueil des athlètes et des spectateurs… Alors, comment faire des JOP « une fête », un marqueur de progrès social pour les travailleurs tout en s’assurant qu’ils n’en subissent pas les conséquences ? Que convient-il de négocier au préalable avec les employeurs ? Partie prenante d’un espace de dialogue social territorial, la CFDT Île-de-France prévoit de nombreuses actions d’information et d’accompagnement des équipes.

(c) Simone Perolari

Les Jeux olympiques de Paris se tiendront du 26 juillet au 11 août et seront suivis des Jeux paralympiques du 28 août au 8 septembre. Ces événements sportifs mondiaux vont mobiliser l’ensemble de la région en termes d’infrastructures et de moyens humains. Près de 15,3 millions de touristes sont attendus dans la période, qu’il s’agira d’accueillir dans des espaces sécurisés, d’héberger, de nourrir…

Charte sociale

Côté emplois directs, le Centre de droit et d’économie du sport (CDES) a récemment réévalué ses estimations : les JOP devraient mobiliser au niveau national et sur l’ensemble de la période, 181 000 personnes et non 150 000, comme initialement prévu. Si le secteur du bâtiment a été le principal pourvoyeur d’emplois jusqu’en 2023 (environ 30 000 personnes), en 2024, les secteurs de l’évènementiel, de la sécurité et de l’hôtellerie-restauration, représenteront le gros des emplois. Ceux-ci sont encadrés par la charte sociale Paris 2024, signée par les organisations syndicales et patronales en 2017, par laquelle les acteurs s’engagent, entre autres, à favoriser l’insertion et l’emploi local. Un engagement qui jusqu’ici a été respecté. « Sur les chantiers – et certains n’avançaient pas comme il fallait – nous avons pu veiller au respect de la charte dans les comités de suivi des sites. Mais cette période est un peu derrière nous, le dernier comité ayant eu lieu en fin d’année », note Raphaël Breton, secrétaire général de la CFDT de l’Est francilien et membre du comité de suivi des sites de Seine-Saint-Denis.
Il reviendra à la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Drieets) de surveiller l’application des règles de droit et de sécurité des salariés sur les sites. Seuls deux secteurs bénéficient à l’heure actuelle d’une dérogation, du 15 juin au 30 septembre : les activités de commerce d’abord, pour le travail dominical dans les zones d’exception, soit quinze arrondissements de Paris, et les entreprises organisatrices et de médias ensuite, qui ont l’autorisation de suspendre le repos hebdomadaire. Pour les autres, le Code du travail s’applique. Les entreprises devront déposer leur demande de dérogation sur une plateforme unique.

 

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Impact indirect

Mais que se passera-t-il pour les autres travailleurs en Île-de-France et enparticulier pour tous ceux qui ne pourront pas télétravailler ? Quel sera l’impact des Jeux pour eux ? À n’en pas douter, il ne sera pas nul : Île-de-France Mobilités a en effet récemment estimé que le trafic dans les transports en commun augmentera de 30 % pendant les deux semaines des Jeux olympiques. Et ce, sans compter, notamment, les zones où la circulation sera interdite. « Nos équipes ont beaucoup de questions sur l’organisation du travail dans la période, qui restent sans réponses précises », constate Hassan Mohamed, secrétaire régional en charge de l’emploi.
C’est au sein d’un « espace de dialogue social territorial », piloté par la Drieets et la préfecture de région, que la CFDT Île-de-France obtiendra des réponses qu’elle pourra ensuite partager avec l’ensemble des équipes syndicales. « Cet espace a été créé pendant le Covid : à l’époque, l’État avait fait le choix de réunir les partenaires sociaux, au niveau territorial, pour faire face à la situation de confinement. En février 2022, la Drieets a proposé de relancer cette dynamique, cette fois-ci dans le cadre des JOP. Il s’agit de partager de l’information notamment sur les transports et la circulation, mais aussi sur l’organisation des conditions de travail pour les travailleurs », poursuit Hassan Mohamed.

 

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Retard à l’allumage

L’espace de dialogue social n’a véritablement démarré qu’en janvier 2024, tributaire d’informations fournies par des tiers : « À titre d’exemple, la préfecture de police a présenté le 19 janvier son plan avec les zones de circulation interdites. Nous attendons encore d’autres outils. Le moins qu’on puisse dire c’est qu’on est en retard étant donné les enjeux », s’exclame Hassan Mohamed. Investie de sa mission d’informer les travailleurs, la CFDT Île-de-France a demandé à la Drieets de proposer un guide sur les droits du travail pendant les Jeux, qui est en cours de réalisation.
Plus récemment, elle a sollicité une rencontre bilatérale avec les autorités organisatrices (Drieets, préfet de région et Île-de-France Mobilités) afin d’« avoir des réponses plus concrètes à nos questions, parmi lesquelles l’accès aux lieux de travail, par exemple, précise Hassan Mohamed. Beaucoup de métiers ne sont pas télétravaillables, comme les domaines de la propreté, des services à la personne, du commerce de détail, les métiers du soin, etc. Et dans les autres cas, quel est le cadre pour négocier avec l’employeur des mesures exceptionnelles pour cette période ? » Après avoir consulté les équipes et fédérations principalement concernées, la CFDT Île-de-France a identifié quelques thèmes qui méritent de faire l’objet de discussions entre partenaires sociaux pour préparer au mieux les travailleurs. « Le Syndicat interdépartemental du commerce (Sico) s’inquiète par exemple du manque d’encadrement des salariés sur les sites et d’une possible usure dans les zones touristiques », poursuit-il.
À partir de ces thèmes et à la demande des syndicats, la CFDT Île-de-France prépare une plaquette d’information, essentiellement juridique, qui sera distribuée aux abords des sites. « En nous basant sur les échanges avec les équipes, nous planchons également sur un cahier revendicatif interprofessionnel », indique Hassan Mohamed.

 

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Des actions de terrain

La CFDT Île-de-France prévoit d’aller à la rencontre des travailleurs d’avril à mi-juillet. Des interventions et des actions seront organisées en lien avec les équipes. Une première intervention de la CFDT Île-de-France est ainsi prévue le fin avril lors de la réunion de l’Union professionnelle régionale (UPR) Santé Sociaux Île-de-France. « Les actions de terrain suivront le modèle de Réponses à emporter. Nous installerons des barnums pour donner des informations aux travailleurs dans les lieux de passage clé. Les questions logistiques (transports, hébergement…) et juridiques seront abordées », explique Hassan Mohamed.
Plus généralement, la CFDT Île-de- France se tient à la disposition des équipes pour les accompagner dans leurs négociations avec les employeurs. Elle travaille sur la question des transports avec la Fédération transport-environnement et le Comité régional des transports et de l’équipement (CRTE) Île-de-France et, pour l’aérien, avec l’Union fédérale de l’environnement, des territoires, des autoroutes et de la mer (UFETAM). « Les mois qui nous séparent des Jeux vont être extrêmement chargés », conclut Hassan Mohamed.